PRATIQUE DE LA MEDITATION DE TCHENREZI

La méditation de Tchenrézi comprend quatre parties :
- préliminaires
- phase de création
- phase d’achèvement
- conclusion

PRELIMINAIRES

Le préliminaire à la méditation inclut deux aspects : la refuge et la génération de l’esprit d’éveil. Les deux sont récités dans la même strophe que l’on répète trois fois :

Sang Gyai/Tcheu Tang/Tso Kyi/Tcho Nam La
Djang Tchoub/Bar Tou/Da Nyi/Kayb Sou Tchi
Da Gui/Djin So/Gyi Pei/Seu Nam Kyi
Dro La/P´enn Tchir/Sang Gyai/Droup Par Chio

En le Bouddha, le Dharma et la Suprême Congrégation
Je prends refuge jusqu’à l’éveil .
Par la vertu de ma pratique du don et des autres qualités
Puissé-je réaliser l´état de Bouddha pour le bien de tous les êtres.

Les deux premiers vers s’appliquent à la prise de refuge, les deux suivants à la génération de l’esprit d’éveil.
La prise de refuge peut se faire de deux manières : sans visualisation ou avec visualisation.
Dans le premier cas, on pense simplement que tous les bouddhas et bodhisattvas sont en fait continuellement présents et que l’on se place sous leur protection.
Dans le second, la visualisation diffère de celle de " l’arbre du refuge ", utilisé en particulier dans les Pratiques Préliminaires, où de très nombreuses figures différentes sont imaginées simultanément : lamas, yidams, bouddhas, membres de la sangha, protecteurs.
La méthode utilisée dans la méditation de Tchenrézi est ce qu’on appelle " la tradition du joyau réunissant tous les lieux de refuge ". On y visualise uniquement Tchenrézi et l’on se place sous sa protection en pensant qu’il rassemble en sa personne le lama-racine, les lamas de la lignée ainsi que tous les autres lieux de refuge, bouddhas, bodhisattvas, yidams, etc…
Dans les deux cas, on ne prend pas refuge seul, mais on imagine qu’on le fait en même temps que tous les êtres de l’univers jusqu’à l’éveil.
La génération de l’esprit d’éveil, en second lieu, consiste à donner à notre esprit l’orientation juste, au seuil de la méditation. On pense : " Je fais cette pratique afin d’être capable de libérer tous les êtres des souffrances du samsara ; lorsque j’aurai atteint l’état de Tchenrézi, j’œuvrerai continuellement pour le bien des êtres, comme lui le fait maintenant ".

 

 

PHASE DE CREATION

La phase de création commence par le développement de la divinité. On visualise qu’au dessus de notre tête, à la hauteur d’une coudée, apparaît un lotus épanoui, puis un disque de lune, sur lequel est posée, verticalement, la syllabe de lumière blanche HRI. Celle-ci produit un rayonnement lumineux qui se propage dans toutes les directions. On imagine que la lumière qui s’élève est une offrande présentée aux bouddhas et aux bodhisattvas, tandis que la lumière qui descend est un flot de compassion qui soulage les souffrances des êtres ordinaires. Puis, la lumière revient vivement dans la syllabe HRI, qui se transforme alors en Tchenrézi, tel qu’il est décrit dans le texte et représenté sur les thangkas.
On récite alors :

Da Sog/ Ka Kyab/Sem Tchenn Gyi//
Tchi Tsouk/Pé Kar/Da Ouei/Teng//
Hri Lai/Pag Tchog/Tchen Ré Zi//
Kar Sel/Eu Sel/Nga Denn Tro//
Dzai Dzoum/T´ouk Dje/Tchen Gyi Zi//
Tcha Chi/Dang Po/Tel Dra Dzai//
O Nyi/Chiel Treng/Pé Kar Nam //
Tar Tang/Rinn Tchenn/Gyenn Gyi Tré//
Ri Dag/Pag Peille/Teu Yog Seul//
Eu Pa/Me Peille/Ou Gyenn Tchenn//
Chiab Nyi/Dor Dje/Kyil Troung Chou//
Dri Me/Da Ouar/Gyab Ten Pa//
Kyab Né/Kunn Du/Ngo Ouor Gyour/

Au-dessus de ma tête et de celle des êtres
Existant dans tout l´espace
Est un lotus blanc et un disque de lune.
Dessus, de la lettre HRI apparaît le Noble Chenrezi
Il est blanc, lumineux, et diffuse des rayons de cinq couleurs ;
Avec un sourire magnifique, son regard est de compassion ;
De ses quatre mains, les deux premières sont jointes,
Les autres tiennent un rosaire de cristal et un lotus blanc
Soies et ornements de joyaux le parent ;
Une peau de biche couvre son épaule ;
Le Bouddha de lumière infinie couronne sa tête ;
Assis, ses deux jambes dans la posture adamantime,
Il s´adosse contre une lune immaculée
En essence, il est tous les refuges réunis

 

La syllabe HRI

Après quoi, on récite trois fois une courte louange, au cours de laquelle on pense que, en même temps que tous les êtres, on rend hommage aux qualités du corps, de la parole et de l’esprit de Tchenrézi. On récite :

Djo Ouo/Kyeunn Gyi Ma Goeun/Kounn To Kar//
Dzo Sang/Gyai Kyi/Ou La Gyenn//
Touk Dje/Tchenn Gyi/Dro la Zi//
Chenrezi La /Tcha Tsel Lo //

Blanc Seigneur, qu´aucune faute ne revêt
Le parfait Bouddha orne votre tête
Vous gardez votre regard de compassion sur les êtres
Chenrezi, je vous rends hommage
.

On pense ensuite qu’en réponse à cette prière, Tchenrézi émet de tout son corps des rayons de lumière qui se répandent dans toutes les directions et rendent pures toutes les apparences :
- l’univers devient le Champ de Béatitude
- tous les êtres deviennent Tchenrézi
- tous les sons deviennent le mantra de Tchenrézi
- toute activité de l’esprit devient l’esprit de Tchenrézi, la conscience primordiale.

Soi-même, on devient en même temps Tchenrézi.

On récite :

Dai Tar/Tse Tchik/Seul Tab Pai/
Pa Peille/Kou Lai/Eu Ser/Treu//
Ma Ta/Lai Ngang/Trul Chie Djang//
Tchi Neu/De Oua/Tchenn Kyi Ching//
Nang Tchu/Kye Dreui/Lu Nga Semm//
Chen Re/Zi Ouang/Kou Soung Tou//
Nang Drak/Rig Tong/Ye Mai Gyour//

Lorsque l’esprit absorbé en cette seule chose
On a ainsi prié, le corps du noble Seigneur émet une lumière
Qui purifie les apparences karmiques impures et les connaissances illusoires ;
Le monde extérieur devient le monde de béatitude,

Le corps, la parole et l´esprit des êtres deviennent le corps, la parole et l´esprit de Chenrezi.
Apparences, sons et cognitions sont indissociés de la vacuité.

Puis, on récite le mantra.
La récitation du mantra OM MANI PADME HOUG est accompagnée de différentes viualisations au cours desquelles, généralement, on s’imagine soi-même sous la forme de Tchenrézi. Mais les débutants, s’ils éprouvent des difficultés avec cette méthode, peuvent, à la place, visualiser Tchenrézi au dessus de leur tête, ou bien dans le ciel face à eux.

 

Nous allons voir ici dix visualisations qui peuvent être effectuées alternativement, sans qu’il y ait obligation de passer de l’une à l’autre, sans nécessité d’ordre non plus, et sans que cette liste soit exhaustive.

VISUALISATION 1 On se concentre sur l’apparence de Tchenrézi : son corps, en entier ou bien successivement les différents éléments, par exemple le visage, puis les mains, les bras, le diadème, les colliers, les bracelets, le joyau, le lotus, le rosaire, les jambes, etc. De la sorte on pratique la pacification mentale ( chiné ) en même temps qu’on développe notre capacité à visualiser.

VISUALISATION 2 On visualise que dans le cœur de Tchenrézi se trouve la syllabe HRI, blanche, posée verticalement sur un disque de lune recouvrant le centre d’un lotus à six pétales. On médite en gardant l’esprit posé sur le HRI.

VISUALISATION 3 Prenant pour base la visualisation précédente, on y ajoute les six syllabes du mantra. Elles sont posées verticalement sur les pétales du lotus, font face au HRI qui est au centre, se succèdent de gauche à droite à partir du OM placé devant. Chaque syllabe est dotée d’une couleur propre :

- OM : blanc
- MA : vert
- NI : jaune
- PAD : bleu
- ME : rouge
- HOUNG : noir

   

On se concentre soit sur l’ensemble, soit sur chaque syllabe successivement.

VISUALISATION 4 Le HRI dans le cœur émet de continuels rayons lumineux qui se transforment en objets, sons et odeurs agréables, ou bien encore prennent l’apparence des symboles ou des substances auspicieuses. On pense que tout ceci est présenté en offrande aux bouddhas et bodhisattvas. Puis les bouddhas et bodhisattvas nous envoient en échange leur grâce et leur bénédiction sous la forme de mêmes lumières qui viennent se fondre dans le HRI.

VISUALISATION 5 Du cœur de Tchenrézi est émis une lumière blanche qui va dans les enfers, apaise toutes les souffrances des êtres qui s’y trouvent, donne la fraîcheur à ceux qui brûlent, la chaleur à ceux qui ont froid, transforme les enfers en champ pur.
Puis, la même lumière se répand dans le monde des esprits avides, calme leur faim, étanche leur soif, le change en champ pur.
On pense ainsi que la lumière se propage successivement dans chacun des six mondes du samsara : après les enfers et les esprits avides, les animaux, les humains, les demi-dieux et les dieux sont à leur tour soulagés de toutes leurs souffrances et des émotions conflictuelles qui les causent.

 

 

VISUALISATION 6 La même que la précédente, mais plus élaborée.
On fait partir chaque lumière d’une des syllabes du mantra posé sur les pétales du lotus dans le cœur, les lumières ayant alors les couleurs des syllabes. Les correspondances sont les suivantes :
- OM blanc : monde des dieux
- MA vert : monde des demi-dieux
- NI jaune : monde des humains
- PAD bleu : monde des animaux
- ME rouge : monde des esprits avides
- HOUNG noir : monde des enfers

VISUALISATION 7 Si l’on a une certaine compréhension de la vision supérieure (lhaktong), on médite sur le fait que le corps de Tchenrézi est dépourvu d’entité propre. Il est vide en même temps qu’apparence, apparent en même temps que vide, comme un reflet dans un miroir.

VISUALISATION 8 On pratique la pacification mentale (chiné) en prenant pour support le son de la récitation du mantra, sans distraction, dans un état où le son et notre esprit sont indifférenciés. On peut aussi penser que tous les sons extérieurs sont aussi le mantra de Tchenrézi.

VISUALISATION 9 On médite sur le fait que tous les sons, perçus comme étant le mantra sont sonorité tout en étant vides, vides tout en étant sonorité.

VISUALISATION 10 Lorsqu’on fait la méditation pour un malade ou pour un défunt, on pense que la lumière qui part du cœur de Tchenrézi se répand sur la personne, la soulage de ses souffrances, la purifie de ses fautes et de ses voiles karmiques et la rend heureuse.
Dans ce cas, on peut visualiser Tchenrézi au dessus de notre tête ou dans l’espace, et imaginer que, à la fin de la méditation, son corps se fond dans celui du malade ou du défunt, de sorte que leurs corps, leurs paroles et leurs esprits deviennent un.
Parmi ces dix visualisations, la première, la seconde, la troisième et la huitième permettent plus particulièrement d’établir chiné ; la septième et la neuvième de pratiquer lhaktong ; la quatrième de développer la dévotion ; la cinquième, la sixième et la dixième sont en rapport plus direct avec la compassion.

La phase de création n’a pas de durée fixe : on la continue autant qu’on le peut ou autant qu’on le veut. On peut y réciter cent, mille, dix mille mantras ou davantage.

PHASE D’ACHEVEMENT

Lorsqu’on a récité le nombre de mantras souhaité, on passe à la phase d’achèvement, qui commence par une résorption progressive de tous les éléments de la phase de création, jusqu’à la vacuité :

- le champ de béatitude se fond dans les êtres visualisés sous la forme de Tchenrézi ;
- ces différents Tchenrézi se résorbent les uns dans les autres pour finalement se fondre dans le Tchenrézi que nous sommes ;
- celui-ci se résorbe simultanément de la tête au cœur et des pieds au cœur dans le mantra ;
- le mantra se fond dans le HRI ;
- les différents éléments du HRI se résorbent les uns dans les autres : d’abord les deux points placés à droite dans le atchoung, qui constitue la partie inférieure de la syllabe proprement dite ;
- puis de bas en haut, le atchoung dans le rata ;
- le rata dans le HA ;
- le HA dans le guigou ;
- le guigou devient lui-même un tiglé ( un petit point de lumière blanche ) surmonté d’un nada ( sorte de petite flammèche ) ;
- le tiglé se résorbe dans le nada ;
- le nada devient de plus en plus fin et disparaît dans la vacuité.

Si on manque de temps, à la place de cette dissolution progressive, on peut imaginer que toutes les apparences de la phase de création disparaissent d’un coup dans la vacuité.

On laisse alors l’esprit au repos, sans visualisation, sans introduire non plus de concepts dans la méditation. On demeure simplement dans une vigilance sans distraction, sans suivre les pensées qui s’élèvent, sans tenter de las arrêter non plus, sans acceptation ni rejet, sans espoir ni crainte.

On médite de cette manière le temps qu’on veut.

CONCLUSION

Lorsqu’on arrête la méditation précédente, on pense de nouveau qu’on est soi-même Tchenrézi, que tous les êtres le sont également, que le monde est le Champ de Béatitude, que tous les sons sont le mantra, etc.. Mais c’est alors une pensée, ce n’est pas une visualisation.

On récite :

Da Chenn/ Lu Nang/Pak Pei Kou//
Dra Dra/ Yi Gue/Druk Pei Yang//
Drenn To/Ye Che/Tchenn Peui Long//

Mon corps et celui des autres sont le corps du Noble Tchenrézi,
Tout son est la mélodie des six syllabes,
L’activité mentale est le domaine de la grande Sagesse.

Ge Oua/Di Yi/Nyour Dou Da//
Chen Re /Zi Ouang/Droup Gyour Nai//
Dro Oua/ Tchik Kyang/Ma Lu Pa /
Da Yi/ Sa La /Geu Par
Chio//

Par cette activité positive,
Ayant réalisé rapidement Chenrezi,
Puissé-je établir en cet état,
Tous les êtres sans exception.

Enfin, on récite un court souhait pour renaître dans la Champ de Béatitude :

Par le mérite de cette méditation et de cette récitation,
Puissions-nous, moi-même et ceux qui me sont liés,
Dès que nous aurons laissé ce corps impur,
Renaître miraculeusement dans le Champ de Béatitude,
Puis, dès après cette renaissance, parcourir les dix terres ,
Et, par émanations, faire le bien des êtres dans les dix directions.

 

 

Les étapes de la dissolution du HRI